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9 février 2012 4 09 /02 /février /2012 12:14

 

Que pense-t-il Michel Onfray de son enveloppe corporelle ?

C’est une question posée par Le Nouvel Observateur (le 09 février 2012) à l’occasion de la parution du « Journal d’un corps » de Daniel Pennac. 

Le philosophe répond : « Il faut déconstruire le corps chrétien » 

 

onfray squelette

     Sipa/Sipa/Photomontage


Plus de cinquante livres après mon premier titre paru, je constate que tous répondent à une seule et même question: que peut le corps ? Question spinoziste, on le sait, dont Deleuze fit savoir un jour que nous n'y avions pas encore répondu. Et pour cause : seuls quelques-uns l'ont vraiment posée, combien dès lors pourraient y avoir répondu ? Ce souci procède des matérialistes de l'Antiquité (dont Spinoza écrivit dans une lettre à Hugo Boxel qu'il les préférait à Platon et Aristote) et du lignage antiplatonicien qui, jusqu'à Nietzsche, fait du corps « la grande raison » à laquelle obéit « la petite raison », autrement dite la raison raisonnable et raisonnante.

 

J'ai donc apporté ma pierre à l'édifice en abordant la question du corps qui mange (trois livres de gastrosophie et une université populaire du goût), du corps qui regarde (une dizaine de livres sur des artistes), du corps qui philosophe (dix années d'université populaire, sept livres parus pour analyser l'articulation de la biographie et de la pensée), du corps sexué et sexuel (deux livres), de l'élargissement du corps postchrétien de la bioéthique (un livre), du corps dépaysé qui voyage (quatre livres).

 

Reste que ce qui pense le corps qui pense, c'est encore et toujours un corps dont il faut faire l'exégèse. Une psychanalyse non freudienne, qu'on pourrait dire concrète avec Georges Politzer, permet d'ouvrir un peu le mystère. Mais mille ans d'empire chrétien sur le monde des idées (et des corps...) a fait du corps la plus refoulée des instances. D'où l'intérêt d'une déconstruction du corps chrétien...


Michel Onfray

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Marc      

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9 février 2012 4 09 /02 /février /2012 00:17

 

 

Michel Onfray (avec entre autres - Jean d'Ormesson, Barbara Cassin, Emmanuel Todd, Florence Dupont, Philippe Sollers, Charles Dantzig) a signé une tribune collective dans Le Monde daté du 09.02.2012 pour dénoncer la politique éducative du gouvernement français qui remet en cause l’enseignement des «humanités classiques».

 

En renonçant aux humanités classiques, la France renonce à son influence


"Est-ce que la France serait devenue suicidaire ? En quelques mois, plusieurs sentences sans appel sont tombées, sans qu'on sache vraiment qui est à la manoeuvre : culture-generale--Voltaire.jpgsuppression de la culture générale à l'entrée de Sciences Po ; invention, digne des Monty Python, d'un concours de recrutement de professeurs de lettres classiques sans latin ni grec ; disparition de l'enseignement de l'histoire-géographie pour les terminales scientifiques...

Autant de tirs violents, sans semonce, contre la culture et contre la place qu'elle doit occuper dans les cerveaux de nos enfants et des adultes qu'ils seront un jour. Une place qu'on lui conteste aujourd'hui au nom du pragmatisme qu'impose la mondialisation. Mais quel pragmatisme, au moment où, partout dans le monde, de la Chine aux Etats-Unis, l'accent est mis sur la culture et la diversité de l'éducation, le fameux soft power ?

En bannissant des écoles, petites ou grandes, les noms mêmes de Voltaire et de Stendhal, d'Aristote et de Cicéron, en cessant de transmettre le souvenir de civilisations qui ont inventé les mots "politique", "économie", mais aussi cette magnifique idée qu'est la citoyenneté, bref, en coupant nos enfants des meilleures sources du passé, ces "visionnaires" ne seraient-ils pas en train de compromettre notre avenir ?

Le 31 janvier s'est tenu à Paris, sous l'égide du ministère de l'éducation nationale, un colloque intriguant : "Langues anciennes, mondes modernes. Refonder l'enseignement du latin et du grec". culture generale grecquesC'est que l'engouement pour le latin et le grec est, malgré les apparences, toujours vivace, avec près de 500 000 élèves pratiquant une langue ancienne au collège ou au lycée. Le ministère de l'éducation nationale a d'ailleurs annoncé à cette occasion la création d'un prix Jacqueline de Romilly, récompensant un enseignant particulièrement novateur et méritant dans la transmission de la culture antique. Quelle intention louable !

Mais quel paradoxe sur pattes, quand on considère l'entreprise de destruction systématique mise en oeuvre depuis plusieurs années par une classe politique à courte vue, de droite comme de gauche, contre des enseignements sacrifiés sur l'autel d'une modernité mal comprise. Le bûcher fume déjà. Les arguments sont connus. L'offensive contre les langues anciennes est symptomatique, et cette agressivité d'Etat rejoint les attaques de plus en plus fréquentes contre la culture dans son ensemble, considérée désormais comme trop discriminante par des bureaucrates virtuoses dans l'art de la démagogie et maquillés en partisans de l'égalité, alors qu'ils en sont les fossoyeurs.

Grâce à cette culture qu'on appelait "humanités", la France a fourni au monde certaines des plus brillantes têtes pensantes du XXe siècle. Jacqueline de Romilly, Jean-Pierre Vernant, Pierre Vidal-Naquet, Lucien Jerphagnon, Paul Veyne sont pratiqués, cités, enseignés dans toutes les universités du globe.

A l'heure du classement de Shanghaï et dans sa tentative appréciable de donner à la France une place de choix dans la compétition planétaire du savoir et de la recherche, la classe politique semble aveuglée par le primat accordé à des disciplines aux retombées économiques plus ou moins aléatoires.

Le président de la République, pour qui les universités américaines constituent un modèle avoué, devrait méditer cette réalité implacable, visible pour qui fréquente les colloques internationaux ou séjourne durablement aux Etats-Unis. Que ce soient les prestigieuses universités de l'Ivy League (Harvard, Yale, Princeton...) ou celles plus modestes ou méconnues d'Iowa ou du Kansas, toutes possèdent leur département de langues anciennes.

culture generale ciceronComment l'expliquer ? Par cette simple raison qu'une nation puissante et ambitieuse ne s'interdit rien et surtout ne fait aucune discrimination entre les disciplines, qu'elles soient littéraires ou scientifiques. Ce fameux soft power, ou "puissance douce", consiste à user d'une influence parfois invisible, mais très efficace, sur l'idéologie, les modes de pensée et la politique culturelle internationale. Les Etats-Unis, en perte de vitesse sur le plan économique, en ont fait une arme redoutable, exploitant au mieux l'abandon par l'Europe de cet attachement à la culture.

Pour Cicéron, "si tu ne sais pas d'où tu viens, tu seras toujours un enfant". C'est-à-dire un être sans pouvoir, sans discernement, sans capacité à agir dans le monde ou à comprendre son fonctionnement.

Voilà la pleine utilité des humanités, de l'histoire, de la littérature, de la culture générale, utilité à laquelle nous sommes attachés et que nous défendons, en femmes et hommes véritablement pragmatiques, soucieux du partage démocratique d'un savoir commun."

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"Au cours des débats et réformes qui agitent la fin du XIXe apparaît l’expression d’humanités classiques (refusées aux filles dans les instructions de Camille Sée !) quand se mettent en place les humanités modernes (avec des langues vivantes) et les humanités scientifiques. [...]

Les humanités classiques se présentent non seulement comme des " études ", comme " une instruction " mais comme une " éducation " de l’individu, de l’esprit, de l’intelligence…[...]

" Alors qu’on préparait la ciguë, Socrate était en train d’apprendre un air de flûte. A quoi cela servira-t-il ? lui demande-t-on. – A savoir cet air avant de mourir. " (cité par Calvino, Pourquoi lire les classiques, Points Seuil, p.14)"

Les humanités : une formation et un savoir, Michèle Gally

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causeur couve

 

Causeur N°44 (février 2012) consacre un dossier à ce sujet :

« Inculture générale. Crimes contre les humanités. », avec douze articles.


 

Voici un reportage vidéo sur ce sujet (on y parle aussi de cette tribune dans Le Monde), diffusé au JT de France 2 le 14 février 2012 et intitulé :

La fin de la culture générale?

 

Merci à Patrick C.  

Ewa   

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19 janvier 2012 4 19 /01 /janvier /2012 16:53

 

albert camus signature

Michel Onfray se retrouve encore une fois «sur le feu de la presse«. Ses propos ont été recueillis par Yannick Delneste et publiés sur le site Sud Ouest le 18 janvier 2012.

« Camus : un homme, un penseur, un philosophe impeccable » 

Michel Onfray parle évidemment d’Albert Camus « subtilement profond », mais aussi de l’anarchisme non violent, de Sartre et Beauvoir - les Thénardiers de la philosophie, de Freud, de la raison et de la passion, de la multiplication des liens lilliputiens tissés par des universités populaires…

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Sud Ouest : Quand et comment avez-vous « rencontré » Camus ?

Michel Onfray : Je dirai probablement comme tout le monde : à l’adolescence… Et c’est le moins bon moment pour comprendre vraiment ce que Camus a à nous dire ! A cette époque on reste à la surface des choses : "L’étranger", c’est l’histoire d’un crime sur une plage, "La Peste", l’histoire d’une épidémie dans une ville d’Afrique du Nord, "Le mythe de Sisyphe", un presque éloge du suicide, "L’homme révolté", une invitation à dire non… Autrement dit, une somme de malentendus. Car Camus est faussement simple et subtilement profond. Il plait pour de mauvaises raisons. Il fait partie des romanciers à lire l’année du bac philo et on ne lit pas son œuvre philosophique en Terminale…

 

Sud Ouest : Votre regard sur lui a-t-il évolué au fil des années ?

Michel Onfray : Oui, bien sûr. D’abord il y a l’âge : j’ai lu Camus à quatorze-quinze ans… Que peut-on comprendre de "L’Homme révolté" à cette époque de la vie ? Les enjeux de ce grand livre ne sont vraiment compréhensibles que si l’on maîtrise les auteurs qu’il critique - Rimbaud, Sade, Breton, les surréalistes, Lautréamont, Hegel, Marx, Bakounine, etc. Ensuite, je lisais à l’époque Sartre et Beauvoir. Je prenais pour argent comptant ce qu’ils écrivaient : c’est publié chez un éditeur qui passe pour être sérieux alors que dans tous ses livres de Mémoire, Beauvoir forge une légende qui met Sartre en majesté et qui, pour ce faire, multiplie les mensonges sur leurs perpétuelles errances. Or Camus a été sartrisé… Lu avec les lunettes de Sartre… Il faut du temps, du travail, de l’esprit critique pour démonter les légendes, en philosophie comme ailleurs. Sartre a été pitoyable et Camus impeccable. Mais on ne le sait qu’à force de lectures croisées…

 

Sud Ouest : Votre enthousiasme est total sur Camus. N’y avait-il rien à nuancer chez l’écrivain et philosophe ?

Michel Onfray : En effet, il fut un homme, un penseur, un philosophe impeccable. Et quand on l’est, on l’est en tout. De la même manière que quand on est personnage détestable, on l’est en tout. Quand j’ai travaillé sur Freud, dès que je tirais un fil, c’était pour découvrir un mensonge, une affabulation, une mystification, une légende. Avec Camus, c’est l’inverse : dès qu’on tire un fil, on découvre un beau geste, une grandeur tenue secrète, un bel engagement caché…

 

Sud Ouest : Pouvez-vous expliquer la notion d’ordre libertaire ?

Michel Onfray : Traditionnellement, on associe l’anarchiste au désordre. Il est le poseur de bombes, le terroriste, le justificateur du terrorisme, le fils de Ravachol ou le copain de la Bande à Bonnot… Or il existe une tradition libertaire française bien oubliée qui est pacifique, non violente, concrète, pragmatique et se propose la révolution par la persuasion, pas par l’attentat. Camus s’inscrit dans cette tradition dans laquelle se trouvent Jean Grave, Sébastien Faure, Han Ryner ou, plus connu, Proudhon.

 

Sud Ouest : De quelle injustice intellectuelle la plus grande a -t-il été victime ?

Michel Onfray : La haine de Sartre et des sartriens - Henri Jeanson, Simone de Beauvoir et une tas d’autres petites frappes du genre Jean - Jacques Brochier auteur de la formule assassine « Camus, philosophe pour classes terminales »… On a fait de Camus un penseur de droite, soutenant le colonialisme, un homme incapable de lire et de comprendre les textes philosophiques, et cent autres choses toutes aussi fausses les unes que les autres. Camus a été un anticolonialiste de la première heure, un défenseur de l’Algérie méditerranéenne donnant des leçons de sagesse à la France et à l’Europe, un ami de la cause arabe et musulmane, une figure emblématique du socialisme libertaire, un grand philosophe dans la tradition française de la ligne claire.

 

Sud Ouest : Quelles principales qualités possédait le Camus philosophe ?

Michel Onfray : La droiture, le sens de la justice, l’incorruptibilité, la passion pour la justice et la vérité…

 

Sud Ouest : Quel regard porterait-il sur le monde d’aujourd’hui ?

Michel Onfray : Dangereux de jouer ce jeu là… On peut imaginer qu’il aurait fait du libéralisme, autrement dit du marché qui fait la loi partout, son adversaire principal…

 

Sud Ouest : Vous ne ménagez pas, en opposition « historique » à Camus, le couple Sartre-Beauvoir : ce dernier a-t-il fait de mal au monde de la pensée du XX e ?

Michel Onfray : Je me contente de faits : avant guerre, les deux vont en vacances en Italie avec des billets offerts par le régime fasciste, pendant la guerre, ils collaborent avec l’ennemi, lui, en écrivant dans une revue collaborationniste, Comoedia, elle, en travaillant à la Radio-Vichy, après guerre ils empruntent le communisme qui est un formidable ascenseur social et justifient toutes les dictatures, pourvu qu’elles soient de gauche (URSS, pays de l’Est, Chine, Cuba, etc.), tout en traitant de Gaule de »fasciste », etc… Ils disposaient d’un formidable pouvoir avec une revue, un éditeur, une meute qui chassait sur ordre de Sartre et Beauvoir… Leurs propos étaient paroles d’Evangile dans le milieu intellectuel, île faisaient la loi comme on la fait en France depuis le triomphe du jacobinisme de la révolution française : qui tient Paris tient la France… Ces Thénardiers de la philosophie tenaient Paris - avec Saint-Germain-des-Près en QG…

 

Sud Ouest : Après vous être attaqué radicalement à Freud, vous déclarez votre flamme aussi radicale à Camus : Michel Onfray n’est-il que passion ? Et cette dernière est-elle toujours bonne conseillère ?

Michel Onfray : Ceux qui se prétendent tout de raison sont aussi passion… Croyez vous que les psychanalystes et les journalistes qui, lors de la parution de mon livre sur Freud, m’ont traité de nazi, de fasciste, de pédophile refoulé, de philosophe d’extrême droite étaient du côté de la raison ? Je n’ai rien à me reprocher de ce côté-là : je mets ma raison au service de la passion et non la passion au service de la passion…

 

Sud Ouest : Vous revenez à l’université populaire des Hauts de Garonne, au sein d’une médiathèque que vous avez inaugurée il y a un an et demi. Quelle est la situation de ce réseau des UP aujourd’hui ?

Michel Onfray : Excellent ! Les UP proposent désormais une alternative gratuite et bénévole dans un monde où l’argent et le marché font la loi… Reste à multiplier ces liens, les ateliers de cette microrésistance libertaire. Le géant Gulliver na-t-il pas été entravé par les Lilliputiens grâce à leur détermination et à la multiplication des liens ?

Marc - Ewa    

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  • Le blog de 4 amis réunis autour de la philosophie de Michel Onfray qui discutaient de la philosophie, littérature, art, politique, sexe, gastronomie et de la vie. Le blog a élargi son profil depuis avril 2012, et il est administré par Ewa et Marc
  • Le blog de 4 amis réunis autour de la philosophie de Michel Onfray qui discutaient de la philosophie, littérature, art, politique, sexe, gastronomie et de la vie. Le blog a élargi son profil depuis avril 2012, et il est administré par Ewa et Marc

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