Du 23 juillet au 24 août 2012, France Culture diffuse les conférences de Michel Onfray données en 2011-2012 dans le cadre de l’UP de Caen :
Contre-histoire de la philosophie - 10e année,
Les consciences réfractaires :
Georges Politzer, Paul Nizan, Albert Camus et Simone de Beauvoir
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14/ UN NIETZSCHEEN DE GAUCHE - 09.08.2012
Albert Camus
1. Un grand oui à la vie - « Noces » (nietzschéisme)
2. Non à tout ce qui ne dit pas oui à la vie : tortures, camps, fascisme… - « L’homme révolté » (nietzschéisme de gauche)
3. Tout ce qui ne tue pas rend plus fort. Il faut imaginer Sisyphe heureux - « Le mythe de Sisyphe » (nietzschéisme humaniste?)
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La réécoute et le podcast de cette conférence « gratuite » ne sont plus disponibles. La diffusion de 15 jours, ce n’était qu’une simple promotion commerciale? Vous êtes «libres» d’y consentir et acheter le produit vendu en coffrets, ou ne pas y céder en tant que consciences réfractaires. :~)
Je vous propose également de consulter ma note en bas du synopsis, l’article « Tout ce qui n’est pas donné est perdu », ainsi que lire et écouter le propos de Michel Onfray sur la consommation éthique (à partir de la 46ème minute).
SYNOPSIS
1/. NIETZSCHEEN DE GAUCHE ?
a) Qu’est-ce qu’un nietzschéen de gauche : · Penser à gauche à partir de Nietzsche
b) Georges Palante, le premier d’entre eux : · Professeur de philosophie à St Brieuc, Louis Guilloux surveillant · Cripure et Le sang noir · Souvenirs sur Georges Palante de Guilloux
c) Jean Grenier, Sallan dans Les Grèves
d) Camus cite La sensibilité individualiste de Palante dans L’homme révolté · Quelques notes de lecture dans ses carnets
2/. CAMUS NIETZSCHEEN
a) Dans Actuelles II (1953) : « Je dois à Nietzsche une grande partie de ce que je suis » (III.397)
b) L’histoire d’amour commence tôt :
1) Au lycée : · Dans Sud (19 ans) : Sur la musique, sur l’esthétique musicale de Nietzsche à partir de Schopenhauer · Chez Schopenhauer : la musique permet d’échapper au vouloir - croit Camus · Et d’entrer dans un monde de rêve · En fait : elle est vouloir qu’on peut contempler mais auquel on ne peut échapper · Pas de monde de rêve chez Schopenhauer ou Nietzsche · Mais Camus a vécu la musique comme une échappatoire · L’oncle Acault / la grand-mère · Vient de découvrir Debussy et Stravinsky – défend le second contre le premier · Bibliographie : · # De Nietzsche : - Ecce homo, Le cas Wagner, Nietzsche contre Wagner · # Sur Nietzsche : - Pierre Lasserre, Les idées de Nietzsche sur la musique - Henri Lichtenberger, La philosophie de Nietzsche
2) Pendant l’occupation, au Panelier : · Charles Andler, Nietzsche. Sa vie et sa pensée.
3) Après-guerre : 1. Travaille exclusivement sur La volonté de puissance pour L’homme révolté 2. 1950, réunit ses chroniques 1944-1948 : Actuelles - Cf. inactuelles - Dédicace de Nietzsche : - « Il vaut mieux périr que haïr et craindre ; il vaut mieux périr deux fois que se faire haïr et redouter ; telle devra être un jour la suprême maxime de toute société organisée politiquement » (II.374) - Voyageur et son ombre. 3. 1954, dans son appartement parisien, une photo de Nietzsche - Char lui en demande une copie. 4. Discours pour la réception du Prix Nobel en 1957, hommage à ses maîtres : - Nietzsche en fait partie. 5. 1960, le 3 janvier, dans l’accident : - Le Premier homme. - Et un exemplaire du Gai savoir.
PREMIÈRE PARTIE : LE GRAND « OUI » A LA VIE
1/. PHILOSOPHER COMME DIONYSOS
a) Noces (1939) · Chef d’œuvre philosophique · Chef d’œuvre nietzschéen · Chef d’œuvre existentiel
b) Domination du schéma deleuzien : · Un philosophe crée des concepts et des personnages conceptuels · Eviction de tous les philosophes existentiels · Religion du néologisme, torture de la langue
c) Noces :
· Dans la tradition de la philosophie française : 1) Clarté de l’expression 2) Lisibilité des exposés 3) Propos existentiel 4) Subjectivité pour accéder à l’universel
· La phénoménologie : - Jargon - Jonglerie conceptuelle - Démonstration de virtuosité idéelle - Jeux de mots avec emboîtage de sens - Création de formules - Collision verbale - Religion du tiret – « l’être-hors-de-soi-en-elle » de la Critique de la raison dialectique
d) Camus : une phénoménologie non philosophique du monde · Description pure qui ne refuse pas la poésie, la littérature, le lyrisme · Noces : 6 pages · Cf. poèmes présocratiques sur la nature · Evitement des proliférations institutionnelles et apolliniennes : - Abus de concepts - Chevillages rhétoriques - Démonstrations sur le mode mathématique · Usages dionysiens : - Profusion d’images - Juxtaposition de sensations - Synesthésies lyriques - Propositions affirmatives - Art des rythmes, des cadences et de la musique littéraire - Façon de faire nietzschéenne - Zarathoustra, sa forme lyrique, incantatoire, musicale, wagnérienne - Souci du réel concret au lieu du culte de l’idée, des mots, du verbe - Contre l’accès cérébral au monde, un accès sensuel : - Corps qui nage, bronze, jouit du soleil, se repaît de lumière, se déplie dans la vie - Corps qui s’expérimente comme force, énergie, puissance - Corps qui expérimente, goûte, touche, sent, voit avec toute sa peau · Une narration pratique · Restitution d’une expérience sensorielle
2/. VIVRE SELON NOCES
a) 6 pages qui changent une vie · Expérience mystique, païenne d’un bain : - S’éprouver fragment de cosmos - Béatitude, jubilation - Travaux pratiques du surhumain
b) Noces montre une façon d’être au monde dans laquelle · La partie se vit comme une jubilation d’être fragment du tout
c) Camus entretient de la vérité concrète des choses : · La brûlure du soleil, · Le parfum des absinthes, · La cuirasse d’argent de la mer, · Les gros bouillons de la lumière, · L’odeur des plantes aromatiques, · Le soupir odorant et âcre de la terre d’été, · Les bougainvillées rosat, · Les hibiscus rouge pâle, · Les roses thé épaisses comme de la crème, · Les bordures d’iris bleu, · Les lentisques et les genêts débordant des ruines, · Les plantes grasses aux fleurs violettes, jaunes ou rouges, · La laine grise des absinthes, la fermentation de leurs essences entêtantes, · L’alcool de ces fleurs faisant vaciller le ciel, · L’héliotrope blanc, · Le géranium rouge sang, · Le crépitement des pierres des bâtiments antiques, · La mémoire des âmes mortes de ces romains retournés au néant, · Le bruissement concertant des insectes, · Les sarcophages vides de morts mais pleins de sauges et de ravenelles...
d) Puis des sensations corporelles : · Plonger, nager, l’eau sur le corps, · Expérimenter ses muscles dans le liquide · Sortir de l’eau · S’affaler dans le sable · Expérimenter la brûlure du soleil, la morsure du sel · Boire une menthe verte glacée · Croquer dans une pêche · S’habiller de lin
e) La Méditerranée est plus de l’eau : · Elle est de l’histoire, de la mythologie, de la poésie, de la littérature, de la philosophie, de la géographie, de la politique.
f) Vivre comme Epicure nous y invitait : tel un dieu parmi les hommes. « Il n’y a pas de honte à être heureux. Mais aujourd’hui l’imbécile est roi, et j’appelle imbécile celui qui a peur de jouir » (I.108).
g) Nietzschéen, il critique : · La culpabilité chrétienne · La haine du corps · La damnation de la chair · Le discrédit de la sensualité · La faute, le péché · Refuse qu’on fasse de ce bain une célébration de l’orgueil animal
h) Contre l’idéal ascétique chrétien · Propose un paganisme : foi dans l’énergie de ce qu’on voit · Panthéisme · « A Tipasa, je vois équivaut à je crois » (I.109).
3/. UNE PENSEE PAÏENNE
a) 1956, entretien au « Monde » : · Camus dit ne pas croire en Dieu, mais n’être pas athée · Récupération chrétienne : - La chute poserait le problème de l’impossibilité de la rédemption dans un monde sans Dieu - Ayant fait son deuil de la grâce
b) Ce paganisme n’est pas réactivation des dieux du polythéisme grec · Mais souscription à la jubilation panthéiste d’être au monde
c) Ce bain méditerranéen est un baptême païen · Cf. paganus, religion des paysans, · Culte de l’immanence qui organise les forces qui font et tiennent le monde · Nietzsche condamnait tous les arrière-mondes · On peut en appeler au cosmos qui n’est pas hors du monde puisqu’il est le monde
d) Dans L’été à Alger : · En Algérie, le christianisme n’a pas eu raison de la naïveté et de la simplicité grecque · Là-bas, quand on meurt, on sait ce que la mort nous enlève · En Afrique, on aime la vie simple, la joie facile, le bonheur d’être au monde · On ne se protège pas du monde en intercalant la culture entre lui et nous (comme en Italie) · « Le contraire d’un peuple civilisé, c’est un peuple créateur » (I.124). · Florence la civilisée contre Alger qui crée.
e) En Algérie on est nietzschéen sans avoir lu Nietzsche · On vit sans mythes · Sans consolations · Sans gâcher le présent par la nostalgie d’un passé révolu · Ni par la crainte d’un futur angoissant · Insoucieux de ce qui advient · On n’aime pas ce qui est stable : on préfère le mouvement, la vie · Pas de talent pour les idées pures, les concepts, les discours · On s’immerge tout entier dans le cours du monde · Le péché chrétien n’a pas de sens · Définition algérienne du péché ? · La malédiction de ne pas savoir se contenter de ce monde-ci · La bêtise d’espérer · La sottise de passer à côté de cette vie qui est la seule.
4/. TIPASA, UN PERSONNAGE CONCEPTUEL ANTIFASCISTE
a) Avant-guerre : · Le nietzschéisme comme une occasion de dépasser le nihilisme européen
b) A la publication de Noces (1939) : · Fascisme en Italie, en Allemagne, en Espagne · Tipasa : remède à Mussolini, à Hitler, à Franco,
c) L’Algérie (que Nietzsche aurait aimé visiter) : · Une solution au nihilisme en Europe : - Sa vitalité, sa force, sa santé, sa naïveté (étymologie)
d) Mais la libération des camps impose une relecture de Nietzsche.
DEUXIÈME PARTIE : LE GRAND « NON » AU GRAND « OUI »
1/. ETRE NIETZSCHEEN APRES AUSCHWITZ
a) Consacre un chapitre à Nietzsche dans L’homme révolté · Ignore que La volonté de puissance est un faux · Fabriqué par sa sœur pour en faire un belliciste, nationaliste, antisémite, raciste, · Précurseur du fascisme et du national-socialisme
b) A 19 ans, Camus s’insurge contre les mauvaises lectures de Nietzsche. · Il sait que Nietzsche : - Diagnostique le nihilisme européen consécutif à la mort de Dieu - Pense sur ce terrain métaphysique de la fin de la morale judéo-chrétienne - Propose une éthique solaire, fidèle à la terre, au monde, amoureuse du réel.
c) A 39 ans soulève une autre erreur de lecture : · L’immoralisme ontologique ne coïncide pas avec une amoralité pratique · La fin du Bien et du Mal absolu n’empêchent pas un bon et un mauvais relatifs.
d) La récupération du surhomme par les nazis est fautive · Mais Nietzsche est fautif de n’avoir rien écrit qui empêche cette récupération · Camus parle d’« une responsabilité involontaire » (III.127)
2/. LA MORT DE DIEU
a) Nietzsche ne tue pas Dieu · Il annonce la mise à mort de Dieu par l’Eglise : - L’Eglise a trahi le message de Jésus qui était... nietzschéen !
b) Car Jésus invitait à accepter le monde tel qu’il est · Il refusait qu’on le juge · Il souhaitait que les hommes n’ajoutent pas du négatif au négatif · Il proposait une éthique concrète pour ici et maintenant
c) En revanche saint Paul qui haïssait la chair, le corps, les femmes · A perverti le message évangélique
d) Le christianisme s’est réclamé du Christ et non de Jésus · Il a tout moralisé, tout calomnié · Il a inventé le péché, le libre-arbitre, la culpabilité, · Les punitions, les récompenses, les châtiments, l’enfer
e) Or le monde est ; il faut l’aimer comme il est.
3/. AMOR FATI ?
a) Théorie du surhumain nietzschéen : · La volonté de puissance · L’éternel retour des choses · Amor fati et jubilation
b) Aux antipodes de la brutalité nazie...
c) Le révolté nie Dieu, · Mais il ne devient Dieu qu’en renonçant à la révolte
d) Camus : amor fati ? · Oui dit Nietzsche. guerre et paix, amour et guerre, bourreaux et victimes · Aimer le cosmos sur nos têtes et les camps de la mort ? · Les camps ont été un nombre infini de fois et reviendront · Rien n’est possible contre... · Voilà ce qui se nomme cruauté chez Nietzsche : - Accepter la vie jusque dans ce qui semble la nier · La pitié est inutile : - Elle n’empêche pas ce qui est d’être et abîme celui qui la pratique · Se rebeller contre la souffrance n’a pas de sens
e) Pour Camus, le marxisme-léninisme : une modalité du nietzschéisme · L’URSS a pris en charge le projet de surhumanité · L’histoire se substitue à la volonté de puissance · Les marxistes consentent à ce que veut l‘Histoire · Marx & Nietzsche : deux fatalismes ontologiques · Dans les deux cas, les individus comptent pour rien · Nietzsche proposait de vaincre le nihilisme ; il l’a accompagné · Pas volontairement, mais rien n’interdit cette lecture chez ses disciples
f) Le grand « oui » n’est plus possible après les camps.
TROISIÈME PARTIE : CE QUI NE TUE PAS REND PLUS FORT
1/. UNE PENSEE DE LA DOULEUR
a) Autre proximité avec Nietzsche : la douleur · Tuberculose à 17 ans · Sait qu’il va mener une vie brève, régulièrement décadente, des rechutes
b) Nager, courir, jouer au foot, danser, faire la fête avec la mort dans ses poumons · Visibilité au quotidien : essoufflement, crachats, sang, fièvre, transpiration, crises
c) Le mythe de Sisyphe, livre nietzschéen · Commencé en 1936 (23 ans), publié en 42 (29 ans) · Le journal de bord ontologique d’un malade
d) Le suicide, seul problème philosophique valable... · A quoi bon vivre, puisqu’il faut mourir ? · Juxtapose les analyses, les notes de lecture, change de thématique · Développe comme pour lui · Cisèle une formule, un aphorisme · Cherche à comprendre pourquoi il lui faudra vivre une vie absurde
e) Ecrit : « Le système, lorsqu’il est valable ; ne se sépare pas de son auteur » (I.288). · Profession de foi nietzschéenne...
e’) Un autoportrait dans ce livre : · Camus a connu la tentation du suicide · Perdu son père jeune dans une guerre absurde · A vu sa grand-mère morte · Porte en lui la maladie · A séduit des femmes · Joué la comédie sur les planches · S’est habillé et comporté en dandy · Thématiques du livre
f) L’absurde n’est pas en soi · Il naît de la comparaison et du décalage · Absurde l’attaque d’une batterie de mitrailleuses au couteau · Absurde dans l’inertie d’un corps mort · Absurde du don juan qui cherche à fuir l’absurdité du monde et en accélère le mouvement · Absurde le comédien qui transforme le paraître en être · Absurdes le conquérant, le créateur – dévots de la cause absurde
g) Lit et cherche des raisons de vivre chez les philosophes : · Jaspers, Chestov, Kierkegaard, Scheler, Nietzsche, Husserl, Dostoïevski, Kafka, Plotin · Ne les analyse pas, les convoque pour illustrer son propos
h) Dans Le mythe de Sisyphe, un chapitre au titre éponyme · Fonctionne comme une chute dans une nouvelle · Raconte l’histoire de Sisyphe · Le rocher qui tombe sans cesse : l’éternel retour · Conclusion du texte : Sisyphe « juge que tout est bien » (I.304). · Face à l’absurde, il n’y a qu’à l’aimer · « Il faut imaginer Sisyphe heureux »
2/. LE PHILOSOPHE-ARTISTE
a) N’est pas normalien, institutionnel, agrégé comme Sartre · Nietzsche est hors institution, un philosophe-artiste · Pas créateur de concepts · Mais inventeur de nouvelles possibilités d’existence · Il veut une éthique esthétique – dionysienne
b) Dans Le mythe de Sisyphe, Camus écrit : pour Nietzsche « un philosophe, pour être estimable (doit) prêcher l’exemple » (I.221). · La philosophie n’est pas une posture.
CONCLUSION
a) Conférences en Italie en 1954 · Camus est allé sur les lieux nietzschéens · Turin, 6, via Carlo Alberto, le lieu de la folie.
b) Avoue n’avoir jamais lu ce récit sans pleurer
c) A plusieurs reprises, Carnets et Discours à Uppsala : · Nietzsche, après la rupture douloureuse avec Lou, allumait des incendies de feuilles sèches et de branches sur les hauteurs du golfe de Gênes · Conclut : « Leur lueur a dansé derrière toute ma vie intellectuelle ». (IV.1180).
BIBLIOGRAPHIE
- Camus, Noces, Folio
- Camus, Le mythe de Sisyphe, Folio
- Roger grenier, Albert Camus soleil et ombre, Folio
- Alain Vircondelet, Albert Camus fils d'Alger, Fayard
- Deleuze & Guattari, Qu'est-ce que la philosophie ? Minuit
- Pierre Bourdieu, Ce que parler veut dire, Fayard
- Michel Serres, Eloge de la philosophie en langue française, Fayard
- Jean-François Mattéi, Philosopher en français, puf
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Voir : Le résumé du cycle de vingt-cinq conférences, l’été 2012
Chers internautes,
L’année dernière, nous étions fidèles au poste, et chaque jour pendant un mois, nous donnions bénévolement de notre temps et de notre énergie pour mettre à votre disposition sur ces pages : un lien vers France Culture, un podcast et un synopsis du cours. Cette année, j’ai décidé de renouveler l’expérience espérant tenir la cadence (mes « coéquipiers » sont les bienvenus pour prendre la relève).
Pourquoi? Parce que ces conférences sont toujours passionnantes, contrairement à certaines interventions médiatiques de Michel Onfray, et j’aimerais qu’elles puissent être écoutées par toute personne susceptible de s’y intéresser, sans restriction aucune. Et enfin, je le fais pour remercier chaleureusement monsieur Patrick Frémeaux, grâce à qui je suis devenue un peu plus lucide.
Michel Onfray n’oublie jamais de souligner, lors de chacune de ses interventions, que ses cours à l’Up de Caen sont gratuits et accessibles à tous. Et c’est vrai. Ceux qui assistent aux séminaires en direct, au théâtre d’Hérouville-Saint-Clair chaque lundi, ne payent pas de billets d’entrée, bien évidemment. Ces cours sont ensuite diffusés gratuitement sur France Culture au mois d’août, l’auditoire devient encore plus large, et c’est tant mieux.
Mais la gratuité et le bénévolat s’arrêtent là, et les enjeux financiers commencent. Jusqu’à l’année dernière, les conférences étaient disponibles pour les retardataires pendant six mois sur le site de l’émission de France Culture. A partir de cette année, « pour des raisons de droits de diffusion et d’utilisation des enregistrements de ces conférences, chaque numéro […] sera podcastable et réécoutable uniquement pendant 15 jours ». Après, ces conférences seront vendues en coffrets d’une valeur d’environ 80 euros chacun par l’éditeur phonographique de Michel Onfray.
Jusqu’à l’année dernière, j’étais l’une de ces personnes qui achetaient les conférences « gratuites ». C’est moi, vous, c’est nous qui engendrons les bénéfices des ventes. Nous finançons qui, quoi?
Peut-être grâce à cet argent, les subventions publiques allouées à l’université populaire - subventions parfaitement légitimes et nécessaires bien évidement, mais insuffisantes, subventions fragiles que la folle et avide secte freudienne a voulu faire disparaître il y a deux ans - ont été augmentées et ont permis d’élargir les activités éducatives et culturelles de l’Up, stimulantes pour toute la région, suivies au niveaux national et international ; je l’ose espérer…
Peut-être le train de vie de Michel Onfray - confortable et sans soucis financiers, parfaitement mérité - en dépend. C’est possible, mais il me semble que le philosophe est plutôt à l’abri du besoin, et d‘autre part, l’argent n’est absolument pas sa motivation première, c’est un homme passionné par son travail, son rapport à l’argent est très sain, il le répète souvent et je ne doute pas de sa sincérité : l’argent est là, c‘est très bien, il n’est pas là, c‘est très bien aussi.
Que finançons-nous donc en achetant les fameux coffrets et qui tient à ces « droits de diffusion « au point de modifier la durée des podcasts et de la réécoute d’une émission sur France Culture? Je n’en sais rien.
S’il y a une chose dont je suis sûre, c’est que les gens qui achètent ces coffrets ne sont pas forcement les plus aisés, au contraire, parfois cet achat « superflu » représente un effort budgétaire conséquent. Je sais également que des conférences vraiment gratuites existent, si vous vous en souvenez, Constance avait déjà parlé du Pharmakon de Bernard Stiegler dans l’un de ses commentaires. J’aimais bien aussi la position du philosophe voyou Olivier Saint-Vincent concernant ses propres diffusions, qu’il avait exprimée dans un courriel, mais je ne peux pas tout répéter. :~)
Et si vous utilisiez votre esprit critique envers tout le monde sans exception comme nous l’apprend si bien Michel Onfray… Vous pouvez donc vous abonner aux podcasts des conférences sur le site de France Culture (j’ai inséré le lien dans le titre de la conférence), les enregistrer tout à fait légalement et conserver dans vos documents dans votre ordi, transférer sur la clé USB, graver… Vous pouvez ensuite les prêter à des amis, envoyer par courriel… Se débrouiller, s’entraider, créer des micro-résistances… Ça vous dit quelque chose? …
Vous pouvez également les acheter, si vous en avez toujours envie.
Bonne écoute!
Ewa - anarchiste anonyme, en association avec l’arrière-grand-père Démocrite, des pervers hérétiques freudiens et des consciences réfractaires