Nous avons fait une overdose de psychanalyse, Freud, madame Roudinesco, complexe d’Œdipe… C’est peut-être aussi votre cas. Néanmoins on aurait bien aimé participer au débat entre Michel Onfray et Boris Cyrulnik que nous apprécions énormément. * Cette conférence-débat sur le thème "Critique et défense de la psychanalyse" a eu lieu à Ollioules (près de Toulon) le 8 avril 2011. Voilà des relations et des impressions du témoin de cette rencontre.
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"La conférence a débuté avec l’exposition du point de vue de Boris Cyrulnik, qui a travers l’histoire de l’évolution de la psychanalyse, a démontré sa nécessité. Cette « science » comme la qualifiait Freud, a permis de traiter des patients qui auraient été quelque temps auparavant considérés comme des « dégénérés mentaux au cerveau amoindri ». Pour lui, comprendre et soigner ne vont pas de pair, et si c’est parfois la psychanalyse en elle-même qui soigne, il faut savoir s’en contenter. La présence de l’autre (le psychothérapeute), est une information tranquillisante et permet au patient de se faire une meilleure représentation de lui- même. En science, il n’y a pas de travail parfait, et si seulement 10% de résultats sont fiables, cela suffit pour faire évoluer la science. Pour Boris Cyrulnik il y a "différents courants de psychanalyse les « intégristes de la psychanalyse, adorateurs de Freud », les usurpateurs, et ceux qui s’en servent comme d’un outil culturel pour aider, et il s’inscrit dans cette dernière lignée."
"Michel Onfray a ensuite exposé son point de vue résolument anti –freudien. Pour lui « Freud était un égocentrique misogyne, machiste et homophobe qui a imposé ses théories comme les seules acceptables, créant un intellectuel collectif qui par exemple, aujourd’hui encore, impose à tous les parents de se poser la question du complexe d’Oedipe ».
Pour lui « la psychanalyse est une réponse aux problèmes du psychanalyste lui-même, et il reproche à Freud d’en avoir fait une vérité universelle et de l’avoir imposée comme la seule acceptable. Pour Freud, soit on est d’accord et il a raison, soit on est contre et donc il a encore plus raison, puisque cela indique que l’on refoule ! »
Pour Michel Onfray « Freud est une aventure littéraire et rien de plus, on présente son œuvre comme une « science guérissante » alors qu’elle n’est pas une science, et qu’elle ne guérit pas »."
"Le débat qui suivit fut passionnant. Michel Onfray prônant le retour du dialogue et l’apprentissage des vraies valeurs de la vie pour aider les autres, comme le faisaient les grands philosophes de la Grèce antique en exposant leurs idées sur la place publique, permettant à chacun d’aborder des sujets essentiels comme la mort, la souffrance, l’amour, la vieillesse… Boris Cyrulnik, pour sa part, rappellant que « certaines vérités sont plus faciles à dire à des inconnus, et que la place du psychothérapeute est donc essentielle pour libérer la parole, et que les nombreux témoignages de personnes ayant été « sauvées » par la psychanalyse est une preuve de sa nécessité dans une société organisée comme la notre ».
La conférence s’est terminée par une discussion à même le podium avec les nombreux « fans » qui avaient fait le déplacement et qui souhaitaient dédicacer leurs livres, certains achetés le soir même auprès de la librairie Ollioulaise l’Arbre aux Livres présente au gymnase lors de cette soirée."
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"La grande leçon de L’Homme neuronal (de Jean-Pierre Changeux)? La matière neuronale est une cire vierge au moment de sa constitution fœtale : on découvrira donc dans l’inconscient ce qui s’y sera trouvé mis de façon ontogénétique, individuelle et singulière - aucune trace de ce qui, comme chez Freud, s’y trouverait par la grâce phylogénétique. L’inconscient freudien est a priori : son essence précède son existence; l’inconscient non freudien est a posteriori : son existence précède son essence.
Cette différence est majeure. Dans le premier cas, quel que soit l’individu, on finit toujours par y découvrir ce que Freud (plus que la phylogenèse…) y aura mis; dans le second, on décèle seulement ce qu’un trajet existentiel a permis d’y mettre. Puisque l’inconscient freudien c’est l’inconscient de Freud, on y voit toujours sans surprise ce qui hantait le docteur viennois - mais l’inconscient de chacun se moque de celui de Freud. D’où la nécessité d’une psychanalyse non freudienne."
Michel Onfray, Apostille au Crépuscule, Grasset 2010, p.190
Ewa