Titouan Lamazou né en 1955 au Maroc, a passé la première partie de sa vie en tant que navigateur : l’équipier d’Éric Tabarly, vainqueur du Vendée Globe et de la Route du Rhum, champion du monde de cours au large…
A partir de 37 ans, il s’est consacré à sa vocation d’artiste : lors de ses voyages, il photographie et peint, les femmes surtout. Il en résulte des expositions, des publications des ouvrages comme « Carnets de voyage », « Femmes du Monde », le titre d’un « artiste de l’UNESCO pour la Paix » en 2003, la création d’une association Lysistrata qui s’occupe de la défense des droits des femmes…
En été 2010, il a exposé ses œuvres à la Médiathèque d’Argentan, à l’invitation de Michel Onfray. La première vidéo en témoigne.
Michel Onfray lui a également consacré un portrait dans la partie Les invités de son « Manifeste hédoniste ». Les trois extraits suivants sont tirés de ce livre.
« Ce que j‘aime chez Titouan, outre le navigateur exceptionnel et l’artiste hédoniste, c’est son talent pour énerver les vedettes de l’art contemporain dont il ne partage pas les codes. Comme il n’a pas les titres de noblesse ni le sang bleu de la caste de ceux qui font l’art dont on parle dans les revues qui parlent de l’art dont on parle ; comme il ne fait partie d’aucune tribu qui permet d’obtenir des dispenses et des indulgences pour être intronisé tout de même dans cette aristocratie ultra-élitaire, qui pétitionne pour la démocratie pourvu que son geste soit relayé par les circuits médiatiques ; comme il ne cite pas à tout bout de champ des auteurs qu’il n’aurait pas lus mais dont les incantations avec ces noms sacrés suffisent à conférer l’aura de sérieux ; comme il parle peu et n’envisage pas une œuvre qui ne parlerait pas pour elle-même et exigerait le décodage de l’artiste promu dès lors professeur de lui-même, le gratin de l’art dit contemporain a, un jour, initié une pétition contre lui. Privilège qu je partage avec lui : la pétition des gens bien-pensants qui aiment la liberté pour eux, mais jamais pour les autres. »
« Autre raison pour moi de l’aimer : il ne méprise pas les gens et ne sacrifie pas à la formule obligatoire chez nombre d’artistes un lieu commun aujourd’hui : le génie n’ayant pas de public, il ne saurait y avoir de génie pour qui a du public… Un propos tenu la plupart du temps par des gens n’ayant ni génie ni public. Son œuvre touche le grand nombre, elle procède d’un travail d’artiste que son auteur ne monte pas en épingle, elle mérite donc l’intérêt qu’on porte aux plus grands.»
«Enfin, il y a les sujets et le message. Dans ce petit monde égoïste autiste, narcissique, nombriliste, il s’engage pour les femmes et attaque tout ce qui les aliène : la réduction de leur être à leur corps ; la logique marchande qui sous-tend la chirurgie esthétique ; la prostitution sous ses formes habituelles ou plus convenues - je songe au mariage bourgeois - ; les discours religieux et les coutumes tribales, dont les mutilations sexuelles ; l’industrie pornographique ; la mondialisation libérale et son cortège de paupérisation dans les pays émergents ; les migrations d’un enfer vers un autre enfer… Titouan Lamazou lutte contre le nihilisme, normal que les nihilistes luttent contre lui.»
Titouan Lamazou présente son exposition « Ténèbres au Paradis, Africaines des Grands Lacs » à la Fnac des Ternes (le 3 novembre 2011)
Un jour, on m’avait offert un élégant coffret "Femmes du Monde". C’était ma première "rencontre" avec Titouan Lamazou. J’ai très vite plongé dans son univers, séduite surtout par la simplicité, la bienveillance à l’encontre du "sujet traité". Ces femmes sont magnifiées, certes, mais pas éthérées. Chaque portrait est révélateur de réalités variées retranscrites par le regard et le coup de crayon ou de pinceau très personnel de l’artiste. Chaque visage retient notre attention par un trait de sa personnalité, l’état d’âme révélé magistralement par petites touches : timidité, souffrance, rêverie, tristesse, méfiance, provocation, regard perçant et lucide, rarement un sourire. J’essayais de deviner ce qu’elles ont vécu, à quoi elles aspiraient, avant de lire leurs poignantes réponses au "questionnaire de Proust" . "J’ai peur de la mort car si je meurs ma mère n’aura plus personne pour s’occuper d’elle". "Ma fille n’a pas survécu à la traversée du fleuve. L’eau était profonde. Un homme l’a aidée mais elle est restée mouillée. Nous n’avions pas de vêtements secs et elle est morte de froid… "
Ma dernière rencontre avec Titouan Lamazou avait lieu le week-end dernier. Actuellement à Paris, jusqu’au 14 janvier 2012 on peut voir une exposition de photos « Afriques » à laquelle Titouan Lamazou participe. Dans les paysages africains il y a toujours… des femmes.